Bilan de la Route du Rock 2018 par la team de Pop is on Fire

Malgré la présence de têtes d’affiche plus grand public, la 28ème édition de la Route du Rock sera malheureusement déficitaire :
– 180 000 euros selon Ouest France ; 21 000 entrées payantes. Il manque en effet 4 000 entrées pour atteindre l’équilibre financier (le dimanche n’ayant pas attiré la foule espérée).
Point positif, un 3ème festival, orienté chansons françaises, devrait se tenir au fort de Saint-Père en aôut 2019, ce qui permettra de mutualiser les équipements et de baisser les coûts de production (ce qui est déjà le cas avec le No Logo festival de reggae qui se déroule une semaine avant la Route du Rock).

Bilan : tops, flops et mentions spéciales.


TOPS

Sylvain Enfeu
Etienne Daho, la belle suprise
Je peux l’avouer, je n’attendais pas grand chose de son concert.
Mais le charisme scénique du rennais d’adoption, et surtout la réorchestration de ses chansons (plus rock en live), m’ont fait passer un agréable moment le vendredi soir au Fort de Saint-Père. J’ai même dansé et chanté sur certains titres (Sortir ce soir, Bleu comme toi, Epaule Tattoo).

Josh T. Pearson, la métamorphose
J’avais eu la chance de le voir en 2011 (en solo) à Rennes à la Chapelle du Conservatoire. Un concert folk magique. Le texan était apparu tel Jesus avec sa longue barbe et ses cheveux longs. Pour son retour à Saint-Malo en 2018, Josh s’est métamorphosé avec l’adoption d’une coiffure blonde 80’s… Sa musique par contre est toujours aussi classe, parfois plus rock, avec l’appui d’un très bon groupe. La version du titre « A Love Song (Set Me Straight) » a été exceptionnelle avec cette superbe trompette !

Phoenix, la grande forme
Même si je ne suis pas fan du dernier album, j’ai apprécié le concert des français le dimanche à Saint-Malo. J’ai surtout adoré la performance du front man, Thomas Mars. Son énergie et son passage dans le public à la fin du concert ont réveillé le Fort. Par contre, les Cramps et The House of Love n’ont jamais joué à la Route du Rock (déclaration de Thomas pendant le concert).
A noter la sympathique reprise de Air « Playground Love ».

Marlon Williams, le crooner
Le concert d’ouverture de cette édition a été remarquable. Marlon a joué de façon plus électrique les titres de son dernier album.

Shame et Protomartyr, la puissance
Pas grand chose à dire (les 2 groupes ont déjà joué à la Route du Rock), à part que les 2 concerts étaient puissants et bons. Rock’n’roll is not dead !

J’ai également bien aimé Jonathan Bree et ses masques blancs (même si je trouve qu’il n’y a pas assez d’instruments sur scène), le Villejuif Underground et The KVB. Et j’ai regardé, sans aimer ni détester, les Lemon Twigs (un groupe pas né à la bonne époque et fan de Bowie visiblement), Charlotte Gainsbourg, Nils Frahm.

Vincent
Au cours d’une édition sans grande découverte, ni immense claque, trois concerts en particulier ont réussi à me procurer un frisson d’excitation : ceux d’Ariel Pink, de Protomartyr et de Shame. Esthétiquement, peu de points communs entre l’iconoclasme du premier, la noirceur des seconds et l’énergie brute des troisièmes. A y regarder de plus près, ils partagent toutefois l’essentiel : quelques grandes chansons, et une capacité à les restituer avec la tension qui fait le sel du punk et des divers descendances qu’il a engendrées.

Sylvain Plantard

1) The Brian Jonestown Massacre
Mes favoris depuis des années… Il manquait certains de leurs classiques dans la setlist (par exemple « Who ! »), il n’empêche que le concert avec la bande d’Anton Newcombe était vraiment un must de cette édition.
Des intros excellentes, du bon son, et toujours la petite touche bonus de Joel Gion au tambourin… que du bonheur !

2) Phoenix
Je les avais vus plusieurs fois sur les festivals de l’Ouest, et c’est de très loin leur prestation la plus convaincante à laquelle j’ai pu assister.
Leur attachement avec le festival y était peut-être pour quelque-chose, il y avait de l’envie et de l’énergie, et le frileux public du fort a naturellement suivi avec au final la meilleur ambiance du weekend.

3) Cut Worms
Une mise en bouche idéale pour la soirée du samedi, encore plus sous le soleil : un son rétro, des compositions douces et efficaces. Max Clarke confirme sur scène le très bon Hollow Ground sorti en mai dernier.

4) Josh T. Pearson
Un set tout sourire pour le Texan, de nombreux échanges, beaucoup d’humour, et surtout quelques titres de très haut niveau à l’image de « Loved Straight to Hell ». Un vrai bon moment !

5) The Limiñanas
Marie et Lionel Limiñana sont très bien épaulés sur scène, au point de s’effacer et laisser leur place au chant au gré des titres, avec même en bonus une brève apparition de Anton Newcombe sur « Istanbul is Sleepy ».
On retrouve sur scène l’ADN du groupe avec des boucles enivrantes, mais en plus une succession de riffs électrisants qui sont moins perceptibles sur album et qui font une réelle différence en live.

En vrac, les autres temps forts pour moi lors de cette édition : Lemon Twigs, Marlon Williams, Ezra Furman, Black Angels et Etienne Daho qui a prouvé qu’il avait tout à fait sa place sur cette affiche.

Manu
La Route du Rock est toujours un rendez-vous attendu même si pour cette 28ème édition, je trouvais la prog’ moins défricheuse, les têtes d’affiche me laissaient dubitative. J’attendais néanmoins des artistes. Les quatre jours ont défilé très vite, avec de très bons moments mais pas de grande claque à la Nick Cave ou PJ.

Phoenix
Le très bon concert de Phoenix m’a réveillée, ça fait du bien ! Avec une nette préférence pour les anciens morceaux. Thomas Mars fait le show, terminant debout dans la foule. La force du groupe est de faire un set avec leurs meilleurs et ou plus dansants morceaux, de survoler les années en jouant les superbes titres de leur 4ème album (2009 Wolfgang Amadeus Phoenix) comme Lisztomania, 1901, Lasso, Girlfriend, et de réentendre If I Ever Feel Better (2000), mixé avec Trying to be cool (2013) et une superbe reprise de Air de Virgin Suicides, Playground Love. Porté par des aficionados, on chante et danse : le tout fonctionne !

Marlon Williams
Superbe découverte live ! Le disque, son 2eme album Make Way For Love, est très beau et triste. J’appréhendais un peu le rendu live. En fait, le set est plus électrique. Entouré de 3 musiciens, Marlon, en vrai crooner, nous accroche complètement, à la guitare comme derrière son clavier. Le très beau morceau Nobody Gets What They Want est poignant, le bassiste remplaçant la voix d’Aldous Harding. Le set se termine de façon magique, sur une reprise Portrait of A Man de Screamin’ Jay Hawkins, Marlon lâchant sa guitare et se rapprochant du devant la scène. Frissons !

Etienne Daho
Je ne suis pas une fan d’Etienne Daho mais là son concert m’a conquise. Une aura particulière l’entoure et quel charisme ! Là, on replonge dans les tubes, Le Grand Sommeil, Bleu comme toi, Tombé pour la France, Epaule Tattoo sur lesquels on a dansé en boite de nuit ou ceux qu’écoutait ma sœur sur son radiocassette… Un Week-end à Rome qui devient St Malo. Réminiscences, toute une adolescence sublimée. Daho est généreux, semble heureux et ému d’être à la Route du Rock. Un concert dansant, tout en rock et pop !
J’ai failli me laisser tenter d’aller prendre un verre à St Malo à l’Ar Iniz sur le sillon pour le croiser – par hasard – dans les lendemains !

Jonathan Bree
De bonne augure ! J’aime beaucoup son disque Sleepwalking, découvert sur le tard. Tout un univers sur scène : le groupe arrive masqué, entouré de deux danseuses telles des automates baroques, le chanteur tient la pause. Chaque morceau apparaît comme un tableau. De la pop ciselée. Agréable, chaloupant. Le morceau Say You Love Me Too, en duo avec une des danseuses est superbe comme You’re So Cool, Roller Disco, Valentine. J’aime sa voix grave et les mélodies. Petit bémol : des sons enregistrés ainsi que les voix féminines.

Josh T Pearson
Tout un personnage ! Adieu le look jésus en solo à la Chapelle du Conservatoire lors de la Rdr hiver 2011 ! Josh T Pearson, c’est une voix, une présence, et des morceaux à tomber, le tout avec désinvolture. Avec son nouveau disque Straight hits! sorti en avril, on change d’univers. Love Straight to Hell a résonné dans le fort ! Superbe. Et un Love Song avec trompette pour finir. Du haut niveau. Et c’était sympa de le croiser à côté de nous pendant Ariel Pink.

Et d’autres très chouettes moments avec la pop de Grizzly Bear, Protomartyr, efficace, Ariel Pink même si j’avais préféré sa prestation à la Rdr hiver, et Nils Frahm vu de trop loin et peut-être tôt dans la soirée pour réellement être prise par ses superbes morceaux envoûtants.

FLOPS

Sylvain Enfeu
Patti Smith qui reprend « Beds are burning » de Midnight Oil. Une version rock pépère FM que je vais vite oublier.
Grizzly Bear. J’étais vraiment bien placé pour voir la pop riche et sophistiquée des Américains. Malheureusement, le son était beaucoup trop fort au début du concert. Mieux à la fin mais impossible d’apprécier la subtilité des compositions. Dommage.
Superorganism qui demande au public d’allumer les lampes des smartphones… Je n’ai pas aimé non plus la musique, façon chorale de collège avec les petits bruits d’oiseaux.
Certains enchaînements de concerts parfois un peu trop rapides (je pense au dimanche). Et donc pas assez entendu les Magnetic Friends qui nous passaient du Sonic Youth… comme il y a plusieurs années.

Vincent
Pas vraiment un flop, mais une déception. La Route du Rock avait décidé cette année d’ouvrir sa programmation à des têtes d’affiches plus consensuelles, Etienne Daho et Patti Smith notamment – deux artistes remarquables, personne ne le conteste – tout en s’appuyant, comme d’habitude, sur quelques valeurs sûres – Grizzly Bear, Black Angels, Jungle, etc. – pour la plupart déjà vues. Un choix assumé par les programmateurs, peut-être contraint en partie par des nécessités économiques, mais qui se fait aussi aux dépens du caractère défricheur qui a longtemps caractérisé ce festival. Le pari, au final, est perdu : 21 000 billets vendus seulement, assez loin des 25 000 nécessaires pour atteindre l’équilibre. Un demi-échec qui interroge sur la pertinence de cette veine « patrimoniale », et plus généralement sur l’évolution de l’identité du festival bientôt trentenaire.

Sylvain Plantard
Parler de flop est un peu fort car il n’y en a pas réellement eu pour moi au niveau des concerts, mais j’étais un peu déçu par le set de Patti Smith qui était pour moi assez plat malgré le côté très attachant de l’icône rock (ce n’était pas vraiment une surprise l’ayant déjà vue par le passé). De même assez déçu par Nils Frahm et à un degré moindre Charlotte Gainsbourg, à relativiser car ce n’est de base pas les artistes qui m’attirent le plus.

Au final le gros flop concerne la restauration avec des attentes très importantes. Je regrette aussi la faible affluence car c’est un festival qui mériterait vraiment plus de reconnaissance, mais par moment je me dis qu’avec plus de monde présent le confort du festivalier pourrait vraiment devenir problématique…

Ultime flop très personnel : avoir manquer l’essentiel de Shame, en étant justement bloqué au niveau de la restauration !

Manu
Pas de recette magique je sais bien, mais Superorganism ? Je ne comprends pas l’engouement.
Je suis restée en dehors du set de Charlotte Gainsbourg, de Patti Smith, des Limiñanas comme celui des Lemon Twigs…
Le son parfois, le surplus de basse était dérangeant, au début de Grizzly Bear notamment.
Et l’absence des labels sur le fort, bien dommage.

MENTIONS SPECIALES

Sylvain Enfeu
A la Route du Rock, merci ! See U next year, winter and summer !
A l’équipe Bateau Ivre/Pop is on Fire FC pour sa victoire 2 à 0 face à l’équipe de la Route du Rock (tournoi de foot le dimanche après-midi).
A Sylvain P pour ses nombreuses photos pendant le festival. Merci à toi !

Vincent
Mention spéciale à la pop française mondialisée de Phoenix et de Charlotte Gainsbourg. Sans tout à fait surprendre, les premiers ont réussi à claquer un pur moment d’entertainment, un best-of inégal mais souvent réjouissant, à l’image de leur discographie. Sans grande personnalité sur disque, la seconde s’est révélée inspirée et touchante sur scène.

Sylvain Plantard
Mentions spéciales de mon côté pour les soirées du jeudi et du vendredi : peu de temps faibles avec des groupes variés qui valent vraiment le détour.
Le genre de programmation que l’on aime voir à la Route du Rock !

J’ajouterai une mention pour les portraits d’artistes par Gaëlle Evellin (que l’on peut retrouver sur www.laroutedurock.com/lecarnetderoute) : de très belles photos, qui plus est dans le cadre très particulier du Fort Saint-Père.

Enfin j’ajouterai une dernière mention pour la belle team PIOF (bien renforcée par le Bateau Ivre) qui termine le tournoi de football « Sports are not Dead » sur une belle troisième place.

Manu
Un clin d’œil à la Team du Finistère qu’on prend plaisir à retrouver à chaque édition été comme hiver ! Et aux passionnés de musique croisés !

Route du Rock 2018

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